Impact d’une stratégie de dépistage de la trisomie 21 délivrant un rendu de risque en un délai court, sur l’anxiété et l’inquiétude des femmes enceintes : enquête d’observation

Sage-femme enseignante à l’école de Bordeaux, Christine Morin était en 2012 doctorante en épidémiologie. Elle a reçu une Bourse de Recherche de 5000 euros pour sa thèse sous la co-direction du Pr Christophe Vayssière, obstétricien au CHU de Toulouse, et du Dr Catherine Arnaud, directeur de recherche en épidémiologie et responsable de l’unité mixte 1027 Inserm–université Toulouse III, "Epidémiologie et analyses en santé publique : risques, maladies chroniques et handicaps".

Son objectif de recherche était "d’optimiser la prise en charge que les sages-femmes et autres professionnels de santé proposent aux femmes enceintes dans le cadre du dépistage de la trisomie 21". En effet, il existait alors très peu d’études sur le retentissement psychologique de ce dépistage chez les futures mères. Or depuis 1997, toute femme enceinte, quel que soit son âge, est informée de la possibilité de recourir gratuitement à un dépistage permettant d’évaluer le risque de trisomie 21 pour l’enfant à naître.

Avec une incidence naturelle de 1/800, soit 1,3 sur 1000 naissances, la trisomie 21 (ou syndrome de Down) est la cause la plus fréquente de retard mental. Christine Morin soulignait qu’en moyenne, à l'époque, le délai d’attente entre le dépistage et le rendu du résultat, lorsque le risque était faible (soit inférieur à 1/250) variait de dix à quinze jours. Or aucune étude n’a mesuré l’impact d’une telle attente sur l’anxiété ou l’inquiétude de la femme enceinte. Christine Morin a donc profité de la mise en place, dans une grande maternité de niveau 3, d’une nouvelle stratégie de dépistage permettant la restitution des résultats dans la journée, pour comparer les deux situations : délai court et délai long. Son hypothèse était que le délai long était plus anxiogène que le délai court chez les femmes à risque. Elle a prévu de la valider en suivant un groupe de 1260 patientes en 18 mois d’enquête. Parallèlement, Christine Morin a évalué la qualité de l’information délivrée aux femmes, notamment la pertinence d’un document de référence rédigé en 2012 sur le dépistage individuel de la trisomie 21.

Entretien avec Christine MORIN

Doctorante en épidémiologie, je suis sage-femme depuis 1980 et sage-femme enseignante depuis 1997. J’ai été sensibilisée à l’inquiétude éprouvée par les femmes à l’occasion du dépistage de la trisomie 21, proposé à l’ensemble des futures mères dans notre pays depuis 1997.
 

Anxiété et inquiétude des femmes enceintes

Le syndrome de Down, ou trisomie 21, maladie chromosomique la plus courante des affections fœtales et des causes de retard mental, fait l’objet d’un dépistage combiné depuis juin 2009. Le seuil de risque retenu pour la démarche diagnostique est de 1/250. Si le risque est élevé (>1/250), une biopsie du trophoblaste ou un prélèvement de liquide amniotique sont proposés aux patientes. Le risque de fausse-couche ou d’accouchement prématuré lié à ces examens cytogénétiques invasifs est de l’ordre de 1%. Ainsi les futures mères sont parfois confrontées à des choix difficiles concernant leur grossesse. La performance des tests (taux détection et faux positif) a été régulièrement évaluée. L’impact psychologique a globalement été moins étudié, or le dépistage peut entraîner de l’anxiété et de l’inquiétude. Un rapport sur le dépistage de la trisomie 21, de la Haute Autorité de Santé, en 2007, notait le manque de données sur l’anxiété et l’inquiétude des femmes enceintes.
 

Toutes les femmes

C’est à cette dimension du dépistage que je souhaite consacrer mon sujet de thèse. Ce travail répond à une problématique essentielle, car elle concerne toutes les femmes suivies dans le cadre de leur grossesse. Deux facteurs, en particulier, peuvent être liés à l’inquiétude et l’anxiété générées par le dépistage :

  • Le temps d’attente des résultats,chez les femmes enceintes à risque faible, qui peut s’étendre de 5 à 20 jours ;
  •  Une mauvaise compréhension de l’information délivrée.

La mise en place, à Paule de Viguier, maternité de type 3, d’une brochure délivrée aux femmes enceintes lors du diagnostic prénatal, va permettre d’étudier l’impact de l’attente sur l’anxiété/inquiétude selon que la période d’attente est courte ou longue. Ma recherche sera réalisée au sein de l’équipe « épidémiologie périnatale et handicaps de l’enfant, santé des adolescents » de l’unité mixte de recherche (UMR) 1027 Inserm-université de Toulouse III et co-encadrée par le Pr Christophe Vayssière, obstétricien et le Dr Catherine Arnaud, responsable directeur de l’unité mixte 1027 Inserm–université Toulouse III.
Nous prévoyons d’inclure 1260 patientes. Les bénéfices attendus sont d’optimiser l’offre de dépistage de la trisomie 21 proposée aux patientes.